Envie d’aventure ? Le portrait qui suit ne devrait pas manquer de vous donner la bougeotte ! Suivez avec nous les traces de Cynthia, une globe-trotteuse franco-malgache de 26 ans qui a passé les vingt premières années de sa vie sous le soleil réunionnais. D’île en île, Cynthia évoque avec légèreté les thèmes de l’identité et du besoin de liberté.

Echappée belle au pays d’Oz

“…Action !” le stress monte, les caméras tournent et les premiers mots s’enchainent, d’abord un peu tremblotant mais très vite de façon plus naturelle.

Winton, Queensland, Australie, Juin 2021 Vision Splendid Outback Film Festival 2021

En cette mi-juin 2021, Cynthia se retrouve propulsée au-devant des caméras. C’est tout à fait par hasard qu’elle se fait «recruter» quelques jours auparavant pour jouer l’un des personnages principaux d’un court métrage réalisé par des étudiants en cinéma, nous raconte-t-elle enjouée. Après avoir fait du fruit picking* dans quelques fermes, elle travaille depuis peu dans un hôtel de la petite ville de Winton dans l’arrière-pays australien. Le Vision Splendid Outback Film Festival 2021, qui s’inspire du festival de films indépendants américain Sundance, s’y déroule. Sur place, la jeune femme fait la connaissance d’un groupe d’étudiants participant au concours et au détour d’une blague, se retrouve avec un script et un texte à apprendre en très peu de temps en vue d’un tournage éclair. « Ma vie est une blague ! » nous confie-t-elle en riant. Il n’y a aucune fatalité dans ce propos mais une légèreté certaine, déconcertante, qui laisse presque entr’apercevoir de la reconnaissance. Comme si la jeune femme avait compris quelque leçon secrète sur l’humour et le sens de la vie…

Suivez les aventures de Cynthia en image sur Instagram! Visionnez le court-métrage « Stars at your feet » sur YouTube.

Retour en arrière

Le 5 mars 2020, Cynthia arrive en Australie. Deux semaines après, le pays se retrouve confiné tout comme une grande partie de la planète. Elle se retrouve donc dans une situation délicate -une mauvaise blague ? – mais malgré les recommandations du consulat français qui lui propose de la mettre sur liste Ariane pour un rapatriement, la jeune femme décide de poursuivre l’aventure avec son amie chilienne. « C’est pas un virus qui va m’arrêter ! »

À l’époque, les deux amies ne s’imaginaient pas la tournure que prendrait ce que nous qualifions désormais de pandémie. S’en suivent six mois sans emploi à vivre des économies qu’elles avaient faites pour obtenir leur Work Holiday Visa australien. Cynthia nous dit cependant n’avoir aucun regret d’avoir quand même foncé. Elle a eu des moments de doutes et des phases difficiles mais les rencontres faites et les leçons apprises en valaient largement la peine. Elle a notamment pu se rendre compte de sa chance au travers d’une belle rencontre, celle du couple de retraités australiens qui les a hébergés elle et son amie pendant leurs six mois de chômage. Malgré les incertitudes, l’aide providentielle de ce couple lui a permis de débuter son périple australien plus sereinement qu’il ne semblait engagé. La jeune femme se décrit volontiers comme une « fausse back-packeuse » et est sincèrement reconnaissante du confort dont elle a pu bénéficier chez ses « anges gardiens ».

Gros plan  

Si l’on remonte un peu plus la chronologie de ce voyage fou, on arrive aux raisons qui ont menées la jeune aventurière au pays des koalas. Et ce n’est pas par militantisme de la cause animale, elle qui est terrifiée par les serpents ! « À vrai dire, je n’étais pas du tout attirée par l’Australie ! » s’enquiert Cynthia. L’idée a été lancée lors d’une discussion plutôt arrosée à chercher « quelque chose de nouveau et d’excitant pour casser la routine » nous confie-t-elle, « J’ai suivi une amie ! ». Aujourd’hui, après plus d’un an, elle fait le bilan de ce « coup de tête ». « Je pense que l’Australie m’a fait grandir pour faire face à ma vie future. » Elle s’explique : « J’ai non seulement appris l’importance d’économiser et de planifier pour mieux faire face à des situations inédites mais je me rends également compte que ce séjour est un vrai voyage intérieur. »

Ce séjour est un vrai voyage intérieur. 

La dolce Vita dans les îles anglo-celtes

« L’Irlande non plus, n’était pas exactement dans mes plans. » Après avoir été assistante de français à Glasgow en Écosse, Cynthia comprend qu’elle n’a pas pour vocation le métier d’enseignante. À l’époque, elle a quelques amies installées dans le sud de la République d’Irlande auxquelles elle a déjà rendu visite. « C’est assez naturellement que j’ai pris mes valises pour m’y installer sans date limite. » Cynthia décrit le caractère rassurant de sa démarche malgré l’absence d’un projet concret. S’en suivent quatre douces années pendant lesquelles la jeune femme fait ses armes dans la vie professionnelle et de fête. « J’avais un salaire confortable que je claquais sans y penser ! » À la lumière de ses péripéties australiennes, son mode de vie irlandais lui semble légèrement immature mais elle ne s’en formalise pas.

Tout ça fait partie de son apprentissage car, pour Cynthia, « une expérience bonne ou mauvaise est toujours bonne à prendre. »

En ce qui concerne son année d’assistanat en Écosse, Cynthia nous explique qu’après la rétraction d’une école de Sheffield, Angleterre, elle s’est retrouvée affectée à une école à Glasgow. Une fois n’est pas coutume, un tour du destin et la jeune femme se retrouve en Écosse sans vraiment l’avoir prévu. Comme un pétale, la jeune franco-malgache semble se laisser porter au gré du vent et accepte volontiers ces destinations surprises. « Go with the flow* » clame-t-elle comme un mantra, qui raisonne particulièrement juste par les temps qui courent. L’Écosse est pour Cynthia le grand saut dans l’inconnu étant donné qu’elle va effectuer ce voyage et cette année seule à tout juste vingt ans.  

* Go with the flow : se laisser porter (par le courant)

L’île intense sans filtre

Nous y sommes… La toute première île vers laquelle Cynthia se soit envolée, la plus intense. Pour la jeune femme, ce qualificatif prend un tout autre sens car pour elle, cette intensité se manifeste à travers une crise identitaire. Auparavant éclipsé par le récit de ses aventures et leur rythme effréné, le thème de l’identité ne peut désormais plus être évité. Avec beaucoup de pudeur, notre aventurière se confie :

« Je suis arrivée à la Réunion quand j’avais quatre ans et demi. Je ne parle pas créole et j’ai grandi avec les traditions malgaches tout en m’adaptant à la vie réunionnaise. Mais du coup, je ne me suis jamais sentie à ma place. » Elle s’empresse de rajouter: « Je ne me sens à ma place nulle part. »

La jeune femme complète en indiquant que même à Madagascar où elle est retournée en 2018, elle comprend la langue mais ne la parle pas. « Là-bas, ma famille m’appelle ‘Vazaha Mahitiny’, étrangère noire en malgache ! » s’exclame-t-elle toujours avec humour. Cynthia n’a aucune honte à avouer ne pas vraiment savoir comment s’identifier mais elle veut cependant clarifier : elle a toujours été très bien accueillie partout ou elle a posé ses valises et plus particulièrement à la Réunion qu’elle considère comme « la maison ». Sa crise identitaire ne l’empêche pas non plus d’apprécier la chance qu’elle a de pouvoir s’adapter n’importe où et les joies que cela lui apporte. La jeune fleur des îles n’a tout simplement pas encore trouvé d’endroit où elle projette de rester pour la vie. 

« Peut-être est-ce la grande leçon que j’ai à apprendre : trouver ma place. »