Qui était Louise Siarane, cette figure incontournable connue comme étant « la grand-mère des Malgaches réunionnais » ? Le peuplement de la Réunion est un récit complexe, tissé de migrations et de métissages. En explorant cette histoire, nous découvrons les racines de la richesse culturelle de l’île. Si la Réunion brille encore aujourd’hui par son harmonie multiculturelle, c’est en partie grâce à des figures comme Louise Siarane, qui a marqué de son empreinte l’histoire et l’identité réunionnaises. Voici l’histoire d’une des trois premières Réunionnaises.

Louise Siarane, aussi connue sous les noms de Siarane Chevannes, Siaram ou Tsy Aranina en malgache, est née en 1644 à Madagascar. Elle serait devenue orpheline en 1645, mais l’on ne sait rien de sa vie avant son mariage avec un colon nommé Étienne Grondin, vers 1669. De cette union avec ce Français originaire de Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire) naît rapidement un fils, François Grondin, l’un des ancêtres malgaches de nombreux Réunionnais.

Reunionnaiseslemag

La colonisation de Madagascar : une histoire en plusieurs actes.

La vie de Louise Siarane bascule le 26 août 1674, une date qui a marqué au fer rouge l’histoire de Madagascar. Pour comprendre cet événement marquant, il faut revenir en arrière, à l’époque de la colonisation de Fort-Dauphin par les Français. En 1642, la Compagnie française de l’Orient, rebaptisée plus tard Compagnie des Indes orientales, s’installe à Fort-Dauphin (dans l’actuelle région de Tolagnaro, au sud-est de Madagascar). L’objectif ? Développer le commerce d’esclaves et de produits locaux comme les épices. C’est la première tentative de colonisation de l’île par les Français. Pour rappel, c’est à la même époque, en 1663, que commence la colonisation de l’île de la Réunion (alors connue sous le nom d’île Bourbon).

Les colons français de Madagascar font rapidement face à des problèmes : ils peinent à s’adapter au climat et, surtout, les populations locales se montrent très méfiantes. À ces relations tendues s’ajoutent la précarité, causée par une série de mauvaises récoltes, et les rivalités entre tribus locales exacerbées par la présence des Français. La tension monte jusqu’à l’explosion, le 26 août 1674, jour du massacre de Fort-Dauphin.

 

Aux origines du peuplement de la Réunion : le massacre de Fort-Dauphin

Le 26 août 1674, une insurrection éclate dans la colonie. Les Français font face à quelque 2 000 villageois malgaches en colère. La rébellion tourne au drame : en une seule nuit, une grande partie des colons installés à Fort-Dauphin et plus de la moitié des villageois malgaches sont tués. Quelques colons réussissent à fuir par la mer. Parmi eux se trouvent Louise Siarane, son mari et leur fils François.

Après un périple de deux ans qui les mène du Mozambique aux Indes, Louise et sa famille accostent sur l’île Bourbon en mai 1676. Le massacre de Fort-Dauphin est donc, lui aussi, aux origines du peuplement de la Réunion. Dès 1677, Louise Siarane perd son mari. À cette époque, les femmes sont peu nombreuses sur l’île, elles ne restent ainsi pas longtemps célibataires. Louise se remarie aussitôt à un soldat de la Compagnie des Indes orientales. Antoine Payet, originaire du sud-est de la France, est lui-même arrivé sur l’île Bourbon en novembre 1674.

Louise Siarane, mère et travailleuse

Le couple s’établit à Saint-Paul et Antoine se fait un nom au sein de la colonie. Il participe à l’administration locale et développe des activités agricoles (la canne à sucre) et d’élevage (cabris, cochons et bœufs). Louise, elle, alterne entre le travail aux champs et les travaux domestiques. Elle est à la tête d’une fratrie de dix enfants.

On dit Louise Siarane très douce et élégante. Elle porte des vêtements colorés troqués lors d’escales de navires sur la baie de Saint-Paul. On dit aussi qu’elle a influencé l’alimentation de base des Réunionnais. En tant que Malgache, elle se nourrit principalement de riz, plus facile à conserver que le blé, aliment de base des colons. Louise décède le 24 septembre 1705, à l’âge de 60 ans. Son époux, Antoine Payet, meurt cinq ans plus tard. Aujourd’hui, Louise est considérée comme l’une des trois premières Réunionnaises.

Ses nombreux enfants, François Grondin et les descendants Payet, sont les ancêtres de nombreux Réunionnais d’aujourd’hui. Louise aurait eu plus de cent petits-enfants ! Parmi eux, une jeune femme, Louise Payet, aurait été mariée à son premier mari, François Cauzan, à seulement 11 ans. Ce dernier est le fils de Paul Cauzan et d’Anne Caze, la tante de la première femme à naître sur l’île : Anne Mousse.

Aucun doute : sa migration forcée de Madagascar à la Réunion a participé à la riche mosaïque culturelle de l’île.